Depuis le 1er janvier 2017, les époux qui sont d'accord à la fois sur le principe de la séparation mais aussi sur ses conséquences, n'ont plus besoin de saisir le juge.
A qui s’adresse le divorce sans juge ? Quelles sont les étapes à suivre ? Comment trouver le bon partenaire pour vous accompagner dans cette procédure ?
La dernière réforme du divorce, dont la justification principale est de "désengorger" la justice, prolonge la tendance à la « contractualisation » du mariage dont l'organisation et la rupture est désormais une affaire privée. Dorénavant, la justice n’est présente que s’il s’agit de trancher un litige.
En effet, alors que le recours au juge était jusqu'à présent obligatoire, la plupart des divorces par consentement mutuel se font désormais sans l'intervention du juge. Le juge n’intervient que si un enfant mineur demande à être entendu par le magistrat. Ce sont près de 55 % des divorces qui sont concernés par cette nouvelle procédure. En parallèle, le magistrat a été remplacé par deux avocats et par un notaire, chargé «d'enregistrer» la convention, mais dont le rôle est bien différent de celui du juge.
Avec le divorce sans juge, le divorce devient une affaire privée que les parties doivent résoudre par elles-mêmes. L’aide d’un médiateur peut toutefois se révéler précieuse pour aboutir à un accord.
Un désengagement du juge et un renforcement de l’accord des parties
Dans l'ancienne procédure de consentement mutuel, l'intervention du juge se justifiait non seulement pour "solenniser" le divorce (contrepartie du caractère "institutionnel" du mariage) mais aussi parce qu'il jouait un rôle actif : c'est lui qui prononçait le divorce et homologuait la convention.
Le juge s'assurait non seulement de la volonté des époux de divorcer mais aussi de l'équilibre de la convention et de la bonne compréhension par chacun de ses engagements. Il recevait d'abord séparément les époux (afin de contrôler leur indépendance dans la prise de décision et leur bonne compréhension de leurs accords) puis ensemble pour confirmer leur volonté de divorcer.
Dans la nouvelle procédure, l’intervention du juge est remplacée par l’obligation des parties d’avoir chacun leur avocat et de déposer la convention au rang des minutes d’un notaire.
Le recours obligatoire à deux avocats est destiné à s'assurer qu'aucun des époux ne subit les pressions de son conjointpour accepter un accord déséquilibré. L'office du juge est ainsi remplacé par le devoir de conseil de chaque avocat vis à vis de son client. Ceci explique que les avocats doivent être indépendants (ils ne peuvent appartenir à la même structure d'exercice).
Par ailleurs il est mis en place un délai de réflexion de 15 jours avant toute signature, afin de s'assurer que les époux ont bien pu réfléchir au contenu de la convention qui leur est envoyée par lettre recommandée avec accusé de réception.
La double mission du notaire ne remplace pas le juge
Dans la nouvelle procédure, le notaire joue un rôle bien différent de celui du juge : le notaire ne prononce pas le divorce mais ne fait que le constater en déposant au rang de ses minutes un exemplaire de la convention de divorce (et de ses annexes) qui aura au préalable était signée par les époux et leurs avocats. Il n'a donc pas à vérifier le contenu ou l'équilibre de la convention. Il ne vérifie pas non plus le consentement des parties, qu'il ne rencontre d'ailleurs souvent pas, sauf lorsqu'il intervient en tant que notaire liquidateur (notamment en cas de bien immobilier).
Pour l'essentiel, le contrôle du notaire est donc purement formel sur des points limitatifs définis par la loi et qui porte essentiellement sur un contrôle limité à l'existence de certaines mentions obligatoires :
- l’identité des époux et de leurs enfants,
- l’accord des époux sur la rupture du mariage et sur ses effets dans les termes énoncés dans la convention,
- l’état liquidatif du régime matrimonial ou en l'absence de biens mention qu'il n'y a pas lieu à liquidation,
- la mention de l'existence ou non d'une prestation compensatoire,
- l’identité des avocats,
- le respect du délai de réflexion de 15 jours,
- l’existence du formulaire signé par les enfants mineurs.
Le rôle du notaire continue cependant à être important d'un point de vue patrimonial dans les cas où il doit liquider le régime matrimonial des époux, notamment lorsqu'ils possèdent des biens immobiliers en indivision ou en commun. C'est en effet le notaire qui va alors rédiger l'acte de liquidation du régime matrimonial et de partage des biens immobiliers.Ce document sera annexé à la convention de divorce.
Un rôle renforcé pour le médiateur
La disparition du juge laisse la place à un tiers impartial et neutre dont le rôle est de faciliter l’accord entre les époux, en toute confidentialité.
L’intervention du médiateur (ou d’un conseiller conjugal et familial) peut faciliter la compréhension par chacun de la décision de divorcer, surtout lorsque la demande émane d’un seul des époux. Elle laisse également la place à une modification de la décision, si des possibilités de réconciliation existent encore.
Enfin elle permet d’aborder tous les sujets indispensables qui doivent être traités dans le cadre d’une séparation :
- la résidence des enfants : plusieurs options sont possibles. Parmi celles-ci, la résidence alternée permet à l’enfant de résider alternativement chez chacun des parents selon un rythme à déterminer
- le sort de la résidence principale : vente, prêt à usage au profit de l’un des époux, partage…
- le partage des autres actifs immobiliers, mobiliers et financiers
- la scolarité, la santé et les loisirs des enfants
- la pension alimentaire des enfants
- l’existence et le montant d’une prestation compensatoire
- le règlement des dettes
- l’impact fiscal des choix effectués
EN CONCLUSION
La procédure de consentement mutuel est marquée par la disparition du juge marquant ainsi la contractualisation du mariage au détriment de son aspect institutionnel.
Si l’intervention obligatoire de deux avocats et d’un notaire contrebalance en partie cette disparition, on sent bien que cette situation n’est pas toujours totalement satisfaisante. On peut notamment regretter le peu de place qui est laissé à une tentative sinon de réconciliation au moins d’explication permettant d’envisager sereinement la suite, surtout si il y a des enfants.
Sans pour autant alourdir la procédure, on pourrait suggérer au législateur de renforcer le rôle des conseillers conjugaux et familiaux (CCF) et des médiateurs. Dans l’attente d’une réforme législative, rien n’empêche aux parties d’y avoir recours spontanément.
EN RESUME LES ETAPES DU DIVORCE SANS JUGE
Etape 1 : consulter un médiateurou un conseil conjugalafin d’épuiser totalement l’hypothèse d’une réconciliation, ou à défaut pouvoir aplanir les difficultésqui sont inévitables dans toute séparation ; pour en savoir consulter le site de l’ANCCEF (Association Nationale des Conseillers Conjugaux et Familiaux).
Etape 2 : chacun des époux doit choisir son propre avocat.
Etape 3 : les époux doivent désigner ensemble un notaire.
Etape 4 : les avocats rédigent et négocient la convention de divorce qui contient les accords des époux relativement aux enfants, à la pension alimentaire, à la prestation compensatoire.
Etape 5 : le notaire dresse l’acte de liquidation du régime matrimonial (en cas notamment de biens immobiliers).
Etape 6 : lorsque les époux sont d’accord sur les textes, un des avocats envoie le projet de convention de divorce (avec ses annexes dont le projet notarié de liquidation de régime matrimonial) à chacun des époux par lettre recommandée avec accusé de réception.
Etape 7 : avant toute signature, un délai de réflexion de 15 jours, à compter de la réception,est nécessaire à partir de la réception de la lettre recommandée.
Etape 8 : signature de la convention de divorce par les époux et les avocats en trois exemplaires.
Etape 9 : envoi par les avocats d’un exemplaire de la convention de divorce au notaire dans un délai de 7 jours.
Etape 10 : « enregistrement » de la convention par le notaire dans un délai maximum de jours : le divorce est effectif.
Etape 11 : les avocats procèdent aux formalités auprès des mairies pour la modification des actes d’état civil (mention en marge de l’acte de mariage et de l’acte de naissance).
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